C’était un sage

Mardi 16 avril. Malgré la foule, une foule immense, un profond silence pèse sur le bourg. Pourtant, l’église est comble et, à l’extérieur, ce sont des centaines de personnes qui se pressent sur la place. Ce silence dure depuis deux jours, depuis les premières heures de la matinée de ce qui aurait dû être un heureux dimanche de printemps. Très vite, la nouvelle a parcouru le bourg avant de se répandre dans les villages et les fermes les plus isolées de la commune, nous laissant tous incrédules puis abattus tellement cette disparition était brutale et totalement inattendue.

Ce furent des obsèques émouvantes, sans discours, sans drapeaux, sans protocole. Des obsèques telles qu’il les aurait souhaitées, lui qui aimait par-dessus tout la modération, la discrétion et la simplicité. Trois qualités qui sont bien souvent le propre de ceux qui sont vraiment issus de la TERRE et qui ne l’ont jamais reniée.

La TERRE. Cette TERRE du Domaine Neuf où il était né le 7 février 1921 et où il avait passé son enfance puis une jeunesse malheureusement écourtée par l’obligation de prendre et d’assumer la responsabilité de l’exploitation au décès de son père et alors qu’il n’avait que 17 ans.  Cette TERRE de Civrais où il s’est montré parfaitement digne de sa profession , sachant conserver et préserver ce qu’il y avait de bon et de positif dans les pratiques anciennes tout en adoptant sans hésiter ce que le progrès des techniques pouvait lui apporter, en particulier dans le domaine de l’élevage où il jouissait d’une réputation amplement justifiée. Cette TERRE du Bourg où, la retraite venue, il a travaillé avec soin son jardin et « sa vigne « , heureux de pouvoir ainsi continuer à accomplir des gestes qui lui étaient familiers depuis si longtemps : semer, cultiver, récolter.

Et puis, surtout, cette TERRE de LOUROUX à laquelle il a consacré énormément de son temps depuis le 10 mai 1953 où il était entré au Conseil municipal. Ce jour-là, il ne se doutait évidemment pas que c’était le début d’un long, d’un très long engagement qui ne devait s’achever que quarante-deux ans plus tard, en juin 1995, lorsqu’il a jugé, avec beaucoup de bon sens, que le moment était venu de laisser aux jeunes le soin d’assurer la relève. Quarante-deux années de dévouement dont vingt-quatre en qualité d’adjoint puisqu’en 1971, soucieux de préserver sa vie familiale et son activité professionnelle, il a volontairement refusé de succéder à son oncle Albert COLLINET et prendre une écharpe de Maire qui, pourtant, lui revenait incontestablement.

Il a bien fallu nous y habituer. Chaque matin, de bonne heure, nous ne voyons plus sa silhouette familière traverser le Bourg jusqu’à la boulangerie. Puis, dans la matinée, un tour sur la place afin de s’assurer que tout était en ordre, un passage à la mairie pour signer un document administratif, une visite à l’employé communal sur un chantier de voirie, il veillait sans relâche et avec efficacité à la bonne marche et à l’entretien d’une commune, SA commune, qu’il aimait tant.

Par l’intermédiaire de ce bulletin, c’est l’hommage de tous les habitants de LOUROUX que nous souhaitons lui témoigner. Le maire, les adjoints, les conseillers municipaux, les membres du CCAS, les employés communaux renouvellent  à Simone, Andrée et Guy leurs sincères condoléances et les assurent de toute leur affection. Pour ma part, je répèterai seulement ce qu’une dame m’a dit à la porte de l’église, le jour des obsèques : » Si tous les hommes étaient comme lui, il n’y aurait jamais de guerre « . Paroles très simples mais tellement vraies. MARCEL GORBINET était tolérant, droit, juste et honnête.  Il nous manque et nous manquera longtemps encore car il était plus qu’un homme de la TERRE : c’était un SAGE.

Michel LANORD